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paul

24/09/2005
11:00
Consommation et Grenelle

(ce texte est une copie d'une réponse à Henry à propos de l'hédonisme dans l'autre forum. Je me permets d'ouvrir un fil à partir de cette réponse, mais c'est surtout pour que Henry ne rate pas ma réponse, car l'autre fil est déjà ancien).
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Cher Henry, j'attends avec impatience ta critique de la société de consommation, car c'est exactement cette société que déjà dans les années cinquante nous anticipions comme l'Enfer à venir.

La problématique de la consommation est très complexe, et je pense qu'il faut commencer par analyser l'impact des deux guerres mondiales sur l'écosystème psychosociologique de l'occident : la guerre a révélé le secret d'un concept dont Aristote avait fait l'Être lui-même, à savoir le mouvement. La dynamis était le moteur de la métaphysique qui nous a conduit vers la civilisation technique et les deux guerres mondiales auront été les illustrations au sens d'attractions de ce que pourrait être une société qui "fonce à cent à l'heure" comme on dit aujourd'hui sans se douter de rien.

Jusqu'en 1914 il y avait encore des freins au déchaînement de la vitesse, et contre les Blériot et autres Roland-Garros, les rationalistes du 19ème ont tenté in extrémis de pacifier ce qu'il sentaient venir à travers le blanc-seing délivré par Kant à la Science et à la technique. Plus à la technique qu'à la science d'ailleurs, Kant a été le penseur-libérateur du technique dans toutes ses extensions.

Quel rapport avec la "consommation" au sens contemporain ? Il y en a plusieurs dont le plus important est une sorte de retour à la condition d'esclaves bien "nourris" et satisfaits de ses maîtres. Le "pouvoir d'achat" est une échelle de valeur centrale pour les décideurs car il entre dans la planification du projet technique comme paramètre incontournable.

Le problème de l'état-providence est bien celui-là : comment conserver l'équilibre du producteur-consommateur-esclave tout en détruisant les mécanismes qu'il a fallu mettre en place pour en sauver l'existence ? Aujourd'hui on met plein phare sur les cinquantes immigrés qui sont en danger dans quelques immeubles parisiens déglingués, alors que le vrai danger est de voir diminuer trop vite (voir les déclarations de Villepin sur les classes moyennes) le pouvoir des consommateurs ?

Sans consommateur pas de marché, c'est bien connu, et le capitalisme n'est pas un jeu de chaise musicale où il suffit de remplacer le consommateur occidental par celui de Chine ou de Malaisie. Comment des millions d'esclaves qui voient dans leur consommation un droit inaliénable laisseraient-ils faire de tels transferts sans moufter ? Voilà qui explique le nouveau paysage politique européen : un ventre mou (40%) de consommateurs encore relativement satisfaits, et 60 % d'esclaves en colère, les uns parce qu'ils réfutent la société de consommation, et pas seulement la gauche car les Droites extrêmes contiennent aussi des formes de critique de la consommation (le nationalisme est tout à fait anti-consommation), les autres parce qu'ils s'estiment lésés dans la répartition des biens de consommation. Les riches ne se sentent pas assez riches, et les pauvres en ont marre de ne pas pouvoir se payer trois ou quatre portables en plus de la 4/4 à crédit.

Pour conclure provisoirement je m'adresserai à Monsieur De Villepin en le mettant en garde contre une négligence qui laisserait la consommation tomber en-dessous d'un seuil vital pour l'équilibre de la société. Mais il y a un problème redoutable, car il y a des prédateurs comme l'AMérique qui se servent de notre épargne pour consommer, et sans une protection drastique contre les coups de Jarnac du dollar combinés avec le pétrole, l'Europe ne peut pas faire face, et nos "consommateurs" risquent très bientôt de se réveiller sans portable et sans 4/4.

Mais c'est dans l'absence que se révèle le présent : c'est précisément lorsque le moteur de la consommation commencera à tousser que les esclaves vont se réveiller et prendre conscience, comme en Mai68, de quelle manière ils ont été cocufiés par le vertige de la vie à cent à l'heure. Ceux qui étaient adultes en 68 se sont rendus compte combien le relentissement et le blocage du pays ont transformé pour quelques semaines leur existence en fête permanente, même dans les usines de Nantes ou de la ceinture rouge de Paris. Ils ont découvert une autre praxis qui aurait pu devenir un idéal concrèt. Mais il y avait deux grands malins qui ont sauvé la mise à la consommation : Chirac et Séguy qui se sont précipité pour combler d'un coup le trou qui s'était creusé entre l'offre de biens et le pouvoir de les acheter. Deux ans plus tard, la France se couvrait de Dauphines et de 404.


Juste encore un chiffre : qui sait qu'en 68, 27% des salariés ne touchaient pas le Smig qui pourtant existait en tant que loi . Dans les usines textiles du Nord et des Vosges, les femmes ne touchaient même pas la moitié de ce Smig. Alors Grenelle ...
Monsieur de Villepin, à quand votre Grenelle ? Avant ou après les élections mouvementées de 2007 ?

Serviteur
Paul
 
paul

04/10/2005
09:04
re : Consommation et Grenelle

Le silence qui règne ici me casse les oreilles.
paulo
 
shhh

04/10/2005
11:45
re : Consommation et Grenelle

Ben moi, je suis pas sûre que l'idée de consommation soit plus opérante que celle de production.
na.
 
guydufau

04/10/2005
14:15
re : Consommation et Grenelle

Les Accords de Grenelle issus du mouvement de mai 68 ont accordé des augmentations de salaires d'une valeur exceptionnelle: quelque 35%. Les signataires ont été les deux jacques : Séguy (1) et Chirac (2). Mais ce qui avait été donné d'une main pouvait être repris par une autre main avec une dévaluation.
Aujourd'hui la situation est différente : les mouvements contestataires, s'ils ne veulent pas se tromper de cible doivent s'attaquer aux institutions financières internationales (les IFI) que sont l'OMC,le FMI, la Banque mondiale...

(1)- Séguy, qui avec la CGT et le PC, a torpillé mai 68
(2)- Chirac, jeune secrétaire d'Etat qui, signe de la grande peur engendré par ces événements, s'était présenté à ces négociations avec un révolver dans sa poche.
 
guydufau

04/10/2005
16:24
re : Consommation et Grenelle

"Ben moi, je suis pas sûre que l'idée de consommation soit plus opérante que celle de production."

Shhhh, "idée de consommation" et "idée de production" ?
Est ce que la consommation ou la production produisent des idées ? Et si ces banales actions ne produisent aucune idée, comment il y aurait une idée plus "opérante qu'une autre ?

 
guydufau

04/10/2005
16:41
re : Consommation et Grenelle

"opérante"
Ce guillemet manquant me permet d'ajouter :
Si la production est inférieure à la consommation, il y a crise, dont il est aisé de sortir. Si la production dépasse la consommation la crise peut devenir catastrophique -voir 1929-et il me semble qu'en diminuant le coût du travail, tout en augmentant la productivité,et une concurrence qui pousse à une production de masse, on s'achemine automatiquement vers cette crise majeure.
 
shhhhhhh

04/10/2005
17:57
re : Consommation et Grenelle

Consommation et production, ce sont des catégories, exprimées par des idées.
Je vois pas pourquoi on parle de société de consommation, alors que la consommation est une conséquence de la production.
29 je croyais que c'était surtout une crise de la spéculation, dont les US ont appris à se prémunir.
Mais je suis pas économiste.
 
paul

06/10/2005
11:33
re : Consommation et Grenelle

Il faut changer d'angle pour examiner la consommation : que veut dire consommation pour un pygmé du Cameroun ou du Gabon ?

Ou encore pourquoi migre-t-on à tout prix, celle même de la vie vers les pays de consommation élevée ? La faim ? NON, la consommation, miroir aux allouettes

ou encore : pourquoi le bio prend-il la place de l'industriel dans le coeur des êtres humains ?

ou encore : pourquoi on s'emmerde devant la télé ?

ça suffit pour l'instant, je vais consommer mon boudin

paulo


 
guydufau

06/10/2005
12:39
re : Consommation et Grenelle


"Consommation et production, ce sont des catégories, exprimées par des idées."
dit Shhhh
ne serait-il pas plus juste de dire : consommation et production sont alimentées pour satisfaire des désirs et comme la production,soit n'est pas utile ou soit dépasse les besoins, il faut faire intervenir la publicité.
Pire, après les attentats de New-York, en 2001, les médias américains ont lancé une campagne en faveur de la consommation pour sauver la bourse et en même temps l'Amérique .
Quand à dire: "je ne suis pas économiste" voila un lieu commun utilisé pout faire croire que seul une élite peut se prévaloir de ce titre, ce qui est une attitude des dominants.

 
shhh

06/10/2005
14:29
re : Consommation et Grenelle

Je vois ça de la façon suivante; la production a pour but le profit, qui se réalise quand les objets produits sont consommés. La consommation est une conséquence de la production . Entre les deux l'idée est d'attacher à la production une notion d'utilité, qu'elle soit réelle ou pas n'intervient pas. On peut rendre "utile" même une bible ou un 4X4 s'il faut en vendre.
Dire que nous sommes une société de consommation n'a pour moi pas de sens. Nous sommes une société fondée sur la production. Plus nous consommons plus nous réalisons le profit déjà créé.
Imaginer qu'en ne consommant plus on casse le mécanisme du profit est peut-être vrai, je n'en sais rien. Le fait est qu'il nous faudra produire de toute façon, mais quoi et comment ?
Bien sûr le décalage entre la production et la consommation peut entraîner des crises, dont le capitalisme d'ailleurs s'alimente, mias ne remet pas fondamentalement le système.

 
paul

07/10/2005
09:40
re : Consommation et Grenelle

Avec tout ce qui se passe au Maroc, je dois faire marche arrière et je suis saisi d'un doute : la faim aurait-elle quand-même tellement progressé dans le Sahel qu'il n'y a pas d'autres solutions pour les aventuriers de Ceuta et Mellila, deux villes si belles et si étranges qui ne méritaient pas ce traitement, encore que les Espagnols auraient depuis longtemps pu les rendre aux Marocains, ce qui leur aurait évité tous ces emmerdements. Vous vous imaginez ? Un pays de gauche qui flingue des affamés ?

Je ne sais pas, je ne sais plus. Je sais seulement qu'au Niger on a une espérance de vie de 42 ans, et que la pluie est rare, que le pays en tant que tel se résume en une mine de beauxite et de pechblende qui ne vaut même pas celle de Conakry. Et vu l'immensité du pays, exactement comme le Mali et le Sénégal, des zones ravagées par Lesieur et Astra, les fabricants de graisses cancérigènes. Agriculture intensive sur une terre qui ne donne qu'une fois tous les trois ou quatre ans, c'est ça Henry, ou je me trompe ? Et le coton invendable pour les raisons qu'on sait ?

Alors oui, il y a une dette, sans remonter plus haut, sans remonter à l'époque de l'île de Gorée où se trouvait le pénitencier pour tous les rebelles de la Colonie. Un jour, l'un d'entre eux, le gabonais Boka, qui avait donné sa vie en échange de la survie de sa tribu fang qui trafiquait sur le fleuve Ogooué, c'est tranché la gorge en débarquant. Un film pour Tavernier ou Spielberg, celui qui aura le plus de fric.

Mais voilà, je ne sais pas, je ne sais plus. Jusqu'à présent j'ai toujours pensé que chacun prenait ses responsabilités pour l'aventure... mais l'aventure est-elle encore possible ?

Question pourtant : pourquoi ils passent tous par là ? N'y aurait-il pas tout un système fait exprès pour les mener là où ils n'ont plus aucune chance de passer ? En tout cas, Marocains ou Espagnols, tous des s.... car il faut connaître le désert algéro-marocain, là où on les lâche, sans eau et sans nourriture face à l'armée algérienne que l'on sait si tendre et si charitable. Mon coeur bave à la poupe.
paulo
 
guydufau

07/10/2005
12:10
re : Consommation et Grenelle



"Je vois ça de la façon suivante, "la production a pour but le profit", dit Shhh.
Mais il y a une autre façon de voir les choses : le profit est aussi issu hors de la production : le bien public qu'est l'eau, engendre du profit et bientot il en sera de même, autre bien public, avec l'air qui, quand il sera davantage pollué, deviendra, lui aussi, une source de profit.(On vendra des filtres à se placer sous le nez)

Shhhh ajoute :"Dire que nous sommes une société de consommation n'a pour moi pas de sens. Nous sommes une société fondée sur la production. Plus nous consommons plus nous réalisons le profit déjà créé"

Heureusement que nous ne sommes pas une consommation de production. Si cela était vrai, nous serions au bord du gouffre. Comme l'a indiqué l'économiste Daniel Cohen le 3 octobre aux "Matins" de FC, en France la production industrielle ne représente plus que 17% du PIB et aux USA que 10% et au détriment de la production des services.
Nous sommes bien une société de consommation et non une société de production; le hic, c'est que la production des services est seconde : il faut d'abord la production industrielle car aves aucune production industrielle, il ne peut y avoir de production de services.

"Bien sûr le décalage entre la production et la consommation peut entraîner des crises, dont le capitalisme d'ailleurs s'alimente, mais ne remet pas fondamentalement le système."
conclut Shhhh
Avec le nouveau capitalisme financier, ne considérer qu'un équilibre entre production et consommation est dépassé : les échanges nécessaires pour le fonctionnement de l'économie réelle c'est à dire les échanges de biens et services et les transactions spéculatives sont dans un rapport de un à soixante, mais c'est un autre problème.


 
shhh

07/10/2005
12:59
re : Consommation et Grenelle

Je ne crois pas que le capitalisme financier soit un fait nouveau. On a déjà vu ça juste avant 1914.
Pouquoi dis-tu qu'il existe un profit hors production ? l'eau n'est devenue un marché que depuis qu'elle nécessite un investissement (nettoyage prospection distribution etc..). Du reste à ce titre, l'écologie fait naître une industrie, particulièrement juteuse d'ailleurs.
Avec une capitalisme plus financier qu'industriel, l'exigence de profit s'accompagne d'une exploitation beaucoup plus importante, car la finance n'ajoute pas de valeur, elle doit se payer sur la bête.
Mais le moteur, c'est la production, pas la consommation.


 
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