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Louise

19/09/2003
15:35
Atmosphère dans les couloirs de France-Culture

Je me demande souvent comment est l'ambiance de travail à France-Culture. Tout de même, des personnes ont été virées, ceux qui restent font-ils comme Arthur Koestler dans le passage (ci-dessous) que j'ai retrouvé dans ses "Oeuvres Autobiographiques" pages 208-210, édition Bouquins

"L’épuration froide traîna toute l’année 1932.(...)L’immeuble de la Kochstrasse [ à Berlin ] devint un lieu de peur et d’insécurité, écho de la peur et de l’insécurité du pays. Nous continuions à arpenter les longs corridors silencieux, avec l’air important des ministres en exercice, mais nous nous observions à la dérobée en nous demandant qui serait la prochaine victime. Il arrivait que les collègues d’un homme le sussent promis à la hache, tandis que la victime elle-même continuait à se pavaner au milieu d’eux, ignorant qu’elle était sur le point d’être congédiée. La situation se résumait assez bien dans une anecdote cruelle qui circulait à l’époque dans toutes les salles de rédaction. C’est la seule historiette chinoise comique que je connaisse, et elle mérite d’être contée, car elle symbolisa l’atmosphère de la République allemande en ces derniers mois.

Sous le règne du second empereur de la dynastie Ming vivait un exécuteur des hautes œuvres nommé Wang Lun. Il était maître en son art, et sa réputation s’étendait dans toutes les provinces de l’empire.
De nombreuses exécutions avaient lieu en ce temps là, et il arrivait qu’il n’eût pas moins de quinze ou vingt hommes à décapiter en une seule séance. La méthode de Wang Lun était de se tenir au pied de l’échafaud en arborant un sourire aimable, son yatagan dissimulé derrière son dos, et, tout en sifflotant un air agréable, de décapiter sa victime tandis que celle-ci gravissait l’échafaud.
Or Wang Lun avait, dans la vie, une secrète ambition, mais il lui fallut cinquante ans de grands efforts pour la réaliser. Il rêvait de pouvoir décapiter une personne d’un coup si rapide que, conformément à la loi d’inertie, la tête de la victime demeurât posée sur son torse de la même manière qu’un plat garde sa position sur une table dont on tire la nappe d’un brusque mouvement.
Le grand moment de Wang Lun vint au cours de la soixante-dix-huitième année de son existence. Ce jour mémorable, il avait seize clients à dépêcher de ce monde de misère dans celui de leurs ancêtres. Il se tenait comme d’habitude au pied de l’échafaud, et onze têtes rasées avaient déjà roulé dans la poussière à la suite de son inimitable coup de sabre. L’instant de son triomphe s’avança avec le douzième condamné.
Lorsque celui-ci commença de monter les marches de l’échafaud, le sabre de Wang passa à travers son cou avec une alacrité telle que la tête de l’homme resta où elle était et qu’il continua à gravir les marches sans savoir ce qui lui était arrivé. Parvenu au sommet, l’homme s’adressa à Wang Lun en ces termes :
- Ô cruel Wang Lun, pourquoi prolonges-tu le supplice de mon attente, alors que tu as traité les autres avec une rapidité si charitable et si charmante ?
En entendant ces mots, Wang Lun comprit que le chef d’œuvre de sa vie était accompli. Un sourire serein éclaira son visage, et puis il dit avec une exquise courtoisie à l’homme qui l’interrogeait :
- Saluez, je vous prie.

Nous nous rencontrions dans les couloirs de notre citadelle de la démocratie allemande et nous disions, avec un pâle sourire : « Saluez, je vous prie. » Puis nous passions un doigt sur notre nuque pour nous assurer que notre tête était toujours bien là."
Arthur Koestler





 
DDFC

19/09/2003
22:57
re : Atmosphère dans les couloirs de France-Culture

Au sujet de l'ambiance à FC, lire http://www.defensedefranceculture.fr.fm/ouverte.htm


 
Jean

19/09/2003
23:20
re : Atmosphère dans les couloirs de France-Culture

Merci pour l'histoire, Louise! Extraordinaire...
 
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