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Henry Faÿ

15/11/2003
18:32
les vivants et les dieux de Michel Cazenave

Bon, je reprends la discussion sur un autre titre, Cazenaze était une petite moquerie reprise de Paul Kobish et mise à la forme interrogative, elle était sans doute déplacée mais non pas une insulte. Il n'est pas contestable que Michel Cazenave est un personnage considérable à qui nous devons beaucoup mais dans le domaine de la création, rien n'est jamais acquis et la critique est toujours possible. J'ai écrit mon opinion mitigée sur les vivants et les dieux qui est une émission qui selon moi ne tient pas toujours ses promesses et je suppose que d'autres utilisateurs du forum viendront compléter cet avis.
Henry
 
Benoît Beyer

16/11/2003
00:35
re : Michel Cazenave

Cher Henry,

J'avais bien compris qu'il s'agissait d'une petite moquerie reprise de Paul Kobish. Et bien sûr, la critique est toujours possible : pour ma part, c'est plutôt en fonction des sujets traités que j'écoute l'émission. Et quand les sujets m'intéressent, en général je trouve l'émission bien faite (à la hauteur du sujet).

Cordialement,

B.
 
paul kobisch

16/11/2003
08:10
re : les vivants et les dieux de Michel Cazenave

Je vais revenir bientôt sur ce sujet puisque vous l'avez pris au vol. A bientôt. Couvrez-vous.
paul
 
paul kobisch

30/11/2003
08:36
re : les vivants et les dieux de Michel Cazenave

bonjour,
Il fut un temps où je n'aurais pour rien au monde raté une seconde de l'émission de Michel Cazenave. C'était hélas il y a bien longtemps ! Dans les années 70, pendant les quelques mois de ma présence en France, puis dans les années 80 où Michel donnait encore à plein régime. De quoi s'agit-il dans mes présentes critiques ?
De ceci : "Des Vivants et des Dieux" est devenu "Des Dieux et des Dieux". Michel a dû faire son apoptéia, mais une apoptéia définitivement religieuse, ce qui s'appelle conversion. Il y a dix ans on entendait encore parler de Derrida, Heidegger, Nietzsche ou Kierkegaard. Michel invitait même des poètes irlandais, genre mystiques laïcs (si c'est possible, mais je crois que oui). Aujourd'hui Corbin est mort, certes, et il reste Jambet qui n'est que...Jambet, malgré toutes ses immenses qualités. Mais j'en ai carrément assez de ce tourisme religieux auquel Cazenave nous contraints tous les samedis matins depuis des semaines. Le cahier des charges du Dimanche nous prive déjà de quelques heures de précieuse liberté culturelle sans que nous soyons obligés de subir, le samedi, une ontologie monopolisée par l'Eglise Orthodoxe ou Nestorienne. En fait, la conversion de Michel semble l'avoir éloigné du questionnement qui a fait le coeur et l'intérêt de son émission unique au monde. J'ajoute encore ceci : l'émission de Michel Cazenave était l'âme de FC. La corruption de ses contenus est donc la cause réelle de la corruption de toute l'antenne. FC a perdu les pédales spirituelles qui en faisaient la voix de la liberté, c'est à dire de la vérité. Il y avait une sorte de jansénisme intellectuel chez Michel. Les Jésuites en ont fait du Pot Au Feu. Sans os à moelle.

A tous.
PK


 
Michel

30/11/2003
09:30
Ne nous trompons pas de cible !?!

Quand on voit le niveau des autres émissions ("Les matins", etc.), je ne pense vraiment pas qu'il soit judicieux de critiquer "Les vivants et les dieux". Ne nous trompons pas de cible !?! Même si cette émission n'est peut-être pas toujours d'une qualité égale, je crois qu'il y a encore chez Michel Cazenave ce jansénisme culturel dont parlait PK. Mais dans les années 80, Michel Cazenave avait en charge toute la programmation de la chaîne, ainsi que les programmes scientifiques. Maintenant, il n'a plus que son émission du samedi matin, qui porte sur les religions et les spiritualités du monde, ainsi que la coordination de l'émission (remarquable) "Une vie, une oeuvre". On ne peut pas lui reprocher de traiter des Dieux dans "Les vivants et les dieux" ! Et traiter de religion, ce n'est jamais traiter seulement des dieux, mais toujours également du rapport que les vivants nouent avec le divin. Encore une fois, je crois vraiment que s'en prendre à cette émission est malvenu (même si cela peut être en partie justifié), compte tenu de l'urgence de la critique par rapport au reste de la dérive de France Culture : il y a trop d'actualité, trop de caprice et trop de mondanité sur France Culture. Mais il n'y a pas trop de culture religieuse : dans un monde occidental largement laïcisé (je ne parle pas des récents problèmes avec la communauté musulmane en France), il est urgent d'approfondir sa culture religieuse. La tolérance ne devrait pas se borner à ignorer l'autre, mais au contraire nous pousser à vouloir le connaître. Michel Cazenave m'a appris beaucoup de choses que je ne savais pas sur différents courants religieux, et même parfois sur la tradition catholique que je pensais pourtant connaître.
 
paul kobisch

30/11/2003
10:40
re : les vivants et les dieux de Michel Cazenave

Le pseudo précédant prête à confusion : je ne veux pas comprendre qu'il s'agisse ici d'un plaidoyer pro domo ? Ce serait trop triste ! Vraiment tragique. Cela dit, ce que je viens de lire me laisse perplexe, pour ête poli. Dieu ou Dieux n'ont jamais été des concepts, tout au plus "le divin" peut-il figurer aux limites de la science ontologique comme figure de style. Ce que ce Michel-ci ne veut pas comprendre c'est que la, les religions, n'appartiennent définitivement pas à la culture en tant que telle, sauf à réduire la définition de la culture à ce qui fait tenir ensemble une société. Ce que le christianisme a bien réussi pendant des siècles grâce à sa complicité avec les instances temporelles. Mais ce temps appartient au passé, dont la connaissance n'est certes pas inutile mais une connaissance purement historique qui ne requiert aucune discipline séparée. Ni aucune herméneutique biblique autre qu'historique. La religion est de manière décisive affaire de sentiment, de croyance ou d'opinion, domaines qui n'ont rien à faire avec celui de la culture dont l'essence réside dans sa distanciation par rapport à ces domaines. Je trouve déjà assez scandaleux que l'état finance encore de nos jours des Facultés de Théologie où l'on continue gaiement à dogmatiser comme du temps de Rabelais. L'Eglise a assez longtemps dominé l'école pour que la loi de séparation des églises et de l'état soit respectée dans toute son étendue. Qu'on ne vienne pas me dire que l'histoire de la religion n'est plus enseignée alors que nous sommes au bout de deux mille ans dominés par le Christianisme. Le problème qui inquiète l'église n'est pas que l'on ignore son rôle dans l'histoire, mais que l'on ai cessé de catéchiser. Sauf en Alsace-Moselle où je conseille à ce Michel d'aller exister pour la paix de son âme. Ultime question : la théologie est-elle une science qui mérite une place dans nos sociétés ? Ma réponse est qu'elle peut faire l'objet d'un examen scientifique, sociologique ou philosophique, au même titre que la littérature ou la poésie, mais qu'elle ne peut en aucun cas représenter une science à part entière, réputée positive de par ce qu'elle apporte au destin présent de l'humanité. Créer une discipline qui se limiterait à l'étude de l'Evangile, par exemple, reviendrait au même que de créer une discipline consacrée à la divulgation de l'oeuvre de Molière ou de Victor Hugo. La religion est une affaire purement individuelle : la relation à l'Être ne doit pas être confondue sans autre avec la relation à (aux) dieu(x). C'est bien la dérive dont je fais le reproche à Michel Cazenave, c'est de se contenter de baigner dans cette substantivation du concept d'être entamée par Platon et scellée comme vérité absolue par la scolastique, au lieu de reprendre la question de l'être où le même Platon l'a abandonnée et où elle a été reprise par la phénoménologie et surtout par Martin Heidegger.
Bien à vous, Michel,
PK




 
Michel

30/11/2003
11:07
Il ne faut pas se tromper de cible !?! (bis)

Tout d'abord, cher PK, je ne suis pas Michel C. et ce n'est pas un plaidoyer pro domo ! Mais je vous trouve vraiment un peu "archéo-anti-clérical". Peut importe, là n'est pas la question et je ne suis pas personnellement croyant. La seule chose que je voulais souligner (apparemment sans succès), c'est que la dérive de France Culture, ce n'est pas une émission qui porte sur "Les vivants et les dieux"; la dérive de France Culture, c'est l'envahissement de cette chaîne par l'actualité et l'information. C'est la france-intérisation, la dérive ! C'est le mauvais sort réservé aux "Chemins de la connaissance", c'est l'empiètement des "Matins" sur la tranche suivante, c'est la réduction des formats longs d'émissions, etc... qui constituent la dérive de France Culture ! Il ne faut pas se tromper de cible !?!
 
laurent nadot

30/11/2003
14:16
Les divans et les vieux

"les religions, n'appartiennent définitivement pas à la culture en tant que telle", voila qui est intéressant mais si on savait comment PK définit "la culture en tant que telle" on pourrait peut-être comprendre la vraie racine de son agacement.

En quoi le cahier des charges du dimanche matin me prive-t-il de liberté ? Je veux bien voir un archaïsme dans la retransmission d'un service religieux mais, outre qu'on ne m'a jamais ligoté devant le poste pour me forcer à l'écouter, je conteste que des émissions sur la religion soient non-culturelles :

Sauf erreur la pensée religieuse appartient à l'histoire de la pensée, ainsi qu'au présent d'une grande proportion de l'humanité (dont des scientifiques, d'ailleurs), et pour toujours elle ressortit à la philosophie. Le sentiment religieux est une façon de se positionner face à l'existence. Il y en a d'autres : la science, la philosophie, l'art, et si on veut la politique, et aussi le travail, tiens. Une émission sur Vuillard, on ne lui reprochera pas de tenter de nous faire aimer Vuillard. Le vendredi matin, un spécialiste de Bergson va nous vanter le travail du maître, et on n'y trouvera pas à redire. La restriction de la liberté, je la vois bien plus du côté de ceux qui veulent faire sauter les émissions traitant de religion.

LA question que je pose sur Cazenave, qui me semble par ailleurs un assez bon exemple d'agnosticisme (corrigez-moi si je me trompe), c'est la réduction de son syncrétisme : est-ce vous, Paul, qui aviez avancé récemment que l'émission avait changé insidieusement de sujets, sans avoir changé de titre ? Voila qui m'intéresse :
- si par exemple vous nous dites : "entre 1998 et 2001, Cazenave traitait de façon équilibrée de toutes sortes de spiritualités, mais depuis Septembre 2001 on avoisine les 50% sur les mystiques chrétiens", là je comprendrai un reproche de déséquilibre.
- Ou mieux : si vous nous dites "jusqu'en 199. , l'émission a traité de Philosophes et de scientifiques (en donnant svp les proportions), depuis 200. ils sont réduits à la portion congrue, au profit des représentants de confessions ou d'historiens de la religion". Là je comprendrai que vous soyez chagriné par l'évolution de l'émission, dont le maitre d'oeuvre, rappelons-le, doit rester MC et non l'auditeur mécontent,tant que la vocation culturelle de l'émission est maintenue.

Mais je sais trop que les récriminations sont bâties sur des impressions qui fréquemment ne résistent pas à la vérification. Voila ce que je crois, aussi parce qu'ayant moi-même suffisamment donné dans le panneau des illusions, avec mes jugements contre cette radio, j'éprouve maintenant le besoin de vérifier si mes impressions sont justes.

Maintenant, je rappelle à PK que je ne suis pas croyant et même pas non plus agnostique : je suis un athée qui ne se pose même plus de question en la matière. Je n'écoute Cazenave que quand je suis bien certain que le sujet va me passionner, et que je saurai résister à son style oral emberlificoté de subordonnées en cascades et d'alignement de compléments coordonnés. Non vraiment il a besoin de revoir complètement sa manière, comme un artiste qui gagenrait à changer de période.
Du coup en un an je l'ai tenté deux fois seulement. Une sur Jung (De profundis : c'est la dernière fois que je le consulte sur un tel sujet). La seconde, il recevait le traducteur du Wei-nan-tseu, en septembre je crois. Ca fait deux scientifiques invités si je ne m'abuse. cette constatation ne vaut pas enquête ni vérification sur les programmes de documents, mais enfin elle montre que je n'écoute pas France Culture avec le même cornet acoustique que vous, PK, et probalement je ne regarde pas non plus le monde avec la même lorgnette.

Comme Michel, je crois en effet que Paul se trompe de cible ou plutôt qu'il a tendance à importer ici un autre combat. La haine des croyances est hélas de nos jours un sentiment très répandu, et les intégrismes sont partout : il y a des intégristes rationalistes (le pompom aux "libre-penseurs" ainsi auto-désignés par imposture sémantique vu leur intolérance), les intégristes de l'art moderne et aussi ceux de l'art ancien, les intégristes du cinéma-réaliste. Il y a de la haine parfois chez certains scientifiques, dont l'acharnement à détruire les croyances d'autrui ne peut s'expliquer par le seul souci de la vérité, mais bien plus par des croyances qui leur sont propres, et par leur acharnement à les imposer .

Alors si c'est le prosélytisme et les croyances qui vous gènent Paul, il faut les pourchasser partout et pas seulement chez les tenants d'une foi qui peut vous sembler dépassée uniquement parce qu'elle fait les beaux jours de ces modernes chasseurs de sorcières que sont les intégristes de la raison .

LN.



 
paul kobisch

01/12/2003
09:42
re : les vivants et les dieux de Michel Cazenave

Pour Michel : pas de panique, à aucun moment je ne vous ai pris pour l’autre Michel, ce n’était qu’une mauvaise plaisanterie. Je ne souscris cependant pas à votre analyse, et ma critique persiste à porter sur l’esprit qui règne désormais à FC, car, comme je l’ai déjà dit, FC continue d’émettre d’excellentes émissions, mais un média est une sorte de corps organique, je dirais presque une personne dans la mesure où son programme recouvre, ou tente de le faire, nos propres états de consciences, plus ou moins bien, plus ou moins honnêtement. Le désamour pour FC, qui remonte à la fin des années 90, ou le malaise des fidèles, doit s’expliquer par son changement de nature lié à la volonté d’atteindre d’autres cibles. Comme je le dis ailleurs, FC a été conçu en 1963 comme soupape intellectuelle, politique et spirituelle, soupape qui permettait de laisser France-Inter imiter les radios privées qui taillaient des croupières mortelles au service public. C’était un îlot où se jouait une réalité réservée à des Bac + et +++. De ce choix est née une équipe vraiment cimentée par un esprit de liberté tout à fait unique dans l’histoire de nos médias. Tellement inquiétante pour les instances qu’il a été question pendant des années de supprimer FC purement et simplement. Une série de drames a marqué un point d’orgue de la crise suscitée par cette menace, le suicide de Bidlowski et le départ de Spire, départ qui illustrait la volonté des nouveaux dirigeants de se débarrasser de l’aile gauche du bel oiseau, mais surtout de modifier les rapports de forces dans le corps propre de FC. Dont acte. Laure Adler a fait sauter ce qui restait encore debout d’une grille qui avait sa logique et sa cohérence. Car l’âme d’un média est sa grille programmatique et le style qui en découle. Les matins de Jean Lebrun étaient un ensemble qui n’a plus du tout le même sens et le même impact dans Pot Au Feu, tout simplement parce que l’homme qui se réveille n’est pas le même que celui qui écoute FC dans la voiture qui le reconduit chez lui après son travail. Bref, on a « cassé » une mécanique précise et précieuse sous le prétexte d’élargir son auditoire, mais ce n’est qu’un prétexte car je doute que la nouvelle grille produise un tel résultat. J’ai travaillé pendant Dix ans à Arte où j’ai vécu la même problématique d’un Audimat misérable, et qui en dépit de toutes les tentatives de démocratisation intellectuelle et de changement de style, demeure misérable. Sauf si on considère que le chiffre de 3% est un bon chiffre au regard des 40 % de TF1 ou des vingtaines de % de France 2 et 3. Je peux même vous informer, c’est une exclusivité, que malgré les apparences de stabilité (de la Direction), la même crise a traversé Arte et produit des effets semblables, mais la différence est que ce média n’avait pas encore atteint son acmé ni son véritable public.

Pour Laurent : les trois premiers paragraphes me paraissent de mauvaise foi. Je n’avais pas l’intention de définir la culture, j’ai seulement dit que si on la « réduisait à »…etc.. Je maintiens par ailleurs que la foi n’est pas de l’ordre de l’esprit mais de l’émotion et du sentiment, éléments psychiques non passibles d’un traitement culturel autre que littéraire ou poétique en général. Je ne conteste pas du tout que la religion puisse constituer une « position face à l’existence », mais elle est une position intime et singulière et qui doit le rester. Que les croyants échangent leurs expériences me laisse de glace, mais pas dans l’espace public. J’ai parfaitement admis par ailleurs, relisez svp, que la théologie puisse être un objet d’études scientifiques. J’ai lu, pour ma part avec beaucoup de profit et de plaisir intellectuel quelques grandes Théodicées dont celle de St Thomas et Leibniz. Et puis où ai-je dit qu’il fallait interdire les émissions sur les religions ? Tout dépend de la place que prennent ses émissions dans la grille et de la nature de ces émissions. Fallait-il le préciser ?
Rien à dire contre le paragraphe 4, cela me paraît fidèle au tableau. Mais arrêtez SVP, je ne suis pas une machine enregistreuse de toutes les émissions de FC ! Les impressions que laisse un média ne se construisent pas scientifiquement, mais avec une marge d’aléatoire. Lorsque Cazenave me sert trois émissions d’affilée sur l’Eglise orthodoxe, je zappe le samedi suivant où je reste au lit, j’oublie Cazenave. Quand-même !
Pour les paragraphes 7 et 8, alors là je trouve que vous y allez fort ! Pendant deux mille ans les athées ont été de la matière première pour bûcher, aujourd’hui encore le religieux occupe, même en politique, l’essentiel du discours général (voyez à côté de cela les vingt minutes concédés aux « Divers aspects de la Pensée Contemporaine » du dimanche matin, entre des heures de cérémonies religieuses. Et encore faut-il préciser qu’entre les Libres-Penseurs, les Rationalistes et les diverses obédiences maçonniques, il faut se les partager ces 20 minutes et attendre son tour chaque mois ou mois et demi). Ah non ! pas de blague, Laurent, et pas de mauvaise foi. Mais laissez moi vous le dire tout net : oui j’importe ici un combat contre le religieux, le même combat qu’on livré tous les athées, mais je vous prie de rester honnête et de laisser l’intégrisme à ceux qui l’ont inventé : il n’y a pas d’intégrisme athée, cette expression est un scandale ou alors un argument de curé planqué. Un athée n’a pas de « croyances qui lui soient propres » puisque l’athéisme consiste à se défendre de toute croyance, TOUTE CROYANCE, y compris le scientisme positiviste ou les utopies progressistes. Ma Bible à moi pourrait être le recueil des œuvres choisies de Sextus Empiricus. Vous savez, ce philosophe qui pensait qu’on ne pouvait même pas affirmer ne rien savoir.

PK

 
lionel

01/12/2003
19:48
re : les vivants et les dieux de Michel Cazenave

Au risque de mettre les pieds dans le plat, que sait-on du suicide de Bidlowski? (à part qu'il a eu lieu sur le lieu de travail). A l'epoque (j'ai oublié la date) il y avait eu une discrétion et une réserve compréhensibles, mais peut-être que desormais on peut en parler?

il y a d'ailleurs un vieux message du forum qui évoquait 2 suicides à FC
 
paul kobisch

01/12/2003
20:13
re : les vivants et les dieux de Michel Cazenave

A propos de B Je n'en sais pas plus que toi, mais le détail que tu nous rappelles nous a tous convaincus que la cause n'était pas ailleurs.
salut
paul
 
laurent nadot

05/12/2003
03:28
réponse à paul kobisch

ah, pas du tout d'accord : l'histoire des passions c'est bel et bien de l'histoire ; et puis la religion c'est des croyances, donc des idées. l'histoire en tant que discipline du savoir, ça comporte bien une histoire des idées. si on expulse les naïvetés du passé hors de l'histoire des idées, on squeeze les 2/3 d'aristote et puis aussi euh au hasard Rousseau tant qu'on y est tiens.

de même si on expulse hors des champs du savoir tout ce qui est religieux, on liquide d'un coup toute l'ethnologie, vu la place considérable prise par les rites dans la vie des populations anciennes. je trouve effarant que d'un côté on fasse des courbettes devant les "merveilleux peuples premiers" (expression chic pour désigner ce qu'on disait il y a peu des "primitifs" ou "archaïques") et qu'on manifeste une telle intolérance à l'encontre des croyances qui ont encore cours chez nous. faut croire qu'une bonne croyance c'est une croyance morte ou quasi, hein ? alors c'est comme les indiens quoi...

je reste sur l'idée que l'athéisme est une croyance, de même que l'absence de communication est communication. en complément de l'axiome de Watzlawick "on ne peut pas ne pas communiquer", je placerai un "on ne peut pas ne pas avoir de croyance". La foi en la science, je le maintiens, en est une.

bon si en constatant dans ses lignes un combat contre les croyances des autres, j'en ai inféré fautivement que Paul Kob préconisait le silence radio sur le sujet, je fais mon mea culpa. mais la fin de ma contrib, les derniers paragraphes qui semblent tellement choquer Paul K. , sont motivés uniquement par ma peur panique des censures et de l'intolérance. que les victimes d'aujourd'hui soient les lointains descendants spirituels des censeurs d'hier ne justifie pas les mauvais traitements que les pseudo-libre-penseurs tentent de leur infliger...

mais tout cela n'a pas grande importance, nous sommes ici pour discuter, et on peut constater qu'il y en a qui savent le faire sans devenir pénibles, contrairement à certains autres (suivez mon regard).

ma façon à moi d'être pénible, c'est la suivante : encore dans l'enfance du positivisme (j'assume), je reste obstiné et buté sur la nécessité de vérifier nos impressions, d'où le développement du paragraphe 4. le conseil méthodologique je me l'applique à moi-même :
- quand me prend l'envie de gerber à l'écoute du style oral de Bourmeau, je me mets à l'écouter avec une ardoise et de la craie et je compte les "euh" et croyez moi ca me revient à une vraie petite fortune en craie
- quand je me dis que Jean Lebrun en remet une couche de trop en promo de l'invité, avec multiples rappels du titre etc etc, eh bien je compte les points .... et je vois que sur une émission incriminée, là ou j'aurais parié sur une promo excessive, il y a UNE mention du titre de ce bouquin fraichement sorti dont il accueille l'auteur. leçon d'humilité pour ma poire : on peut donc être agacé à tort. parfois.
- quand un râleur coutumier des rumeurs vient me dire qu'il n'y a plus de cinéma sur F-C ou alors pas assez parce que "projection privée" c'est juste 30 minutes le dimanche soir, eh bien je vais compter les fois où on parle occasionnellement de ciné : chez Voinchet, Assouline, Veinstein Munier ou dans certains magazines (dont les musicaux, oui !) ou bien Répliques 1 fois l'an à tout casser, et je vois qu'on parle plus de cinéma que de bien d'autres sujets tout aussi culturels. le râleur savait râler mais il ne savait pas compter. gênant.
- quand je tombe à la renverse en écoutant Laura Delair interviewer Georges Steiner, je ré-écoute et je cherche à comprendre pourquoi c'est si nul comme façon d'interviewer. est-ce que c'est vraiment mieux quand c'est veinstein 7 ans avant ? face au même invité, l'une me semble poticharde à l'excès, l'autre fait un bon boulot. si je trouve pas pourquoi, je dirai rien,et ça peut prendre du temps en ré-écoutes.
voila, je voudrais pas que ca sonne comme une leçon. par ailleurs je sais que la soif de vérité est un vice ou bien peut-être un masque névrotique, et que le doute est le meilleur ferment de l'inaction. "trop de réflexion tue l'action : il faut à celle-ci le mirage de l'illusion". C'est dommage en effet, surtout quand ledit trop de réflexion ne débouche sur rien de bon. Bah tant pis, l'honnêteté intellectuelle, c'est peut-être ça aussi... J'ai la prétention d'affirmer que je n'ose pas certifier ce que je crois tant que j'ai pas trouvé des raisons solides pour continuer à croire.

LN.

PS : pour ce qui est de cazenave, une recherche sur le programme depuis 10 ans ne nécessiterait pas d'écouter l'intégrale, ni même d'enregistrer chaque semaine. ce qu'il faudrait c'est consulter "la semaine de r-f" en bibliothèque. mais déjà rien qu'avec les pages d'archives de l'émission sur le site F-C on doit pouvoir compter les points des derniers mois et même peut-etre sur plusieurs années. bah je vais tâcher de me le faire ce compte-là, tiens... rien que pour prouver ma bonne foi (arf')


 
paul kobisch

06/12/2003
09:52
re : les vivants et les dieux de Michel Cazenave

Personne ne doute de ta (il paraît qu’il faut se tutoyer sur ce forum, je me conforme donc à ce réquisit) bonne foi, tu n’as donc nul besoin de la prouver. Ce qui devient douteux, c’est que la poursuite de ce débat puisse avoir lieu. Nos pensées divergent sans doute trop radicalement pour qu’il puisse s’installer un dialogue fructueux. Ce serait un peu comme si on demandait à Bossuet (cette référence te convient-elle ?) de dialoguer avec Gassendi, pourtant prélat comme lui (cette comparaison me va fort bien). Pour rire, va donc faire un tour dans l’Histoire Universelle du dit Bossuet)
Les « croyances sont des idées ». Le moins qu’on puisse dire est que tu n’as rien d’un platonicien pour confondre ainsi la doxa et l’aletheia. Soit, si tu veux dire qu’une croyance est une représentation, je t’en donne acte, mais toute représentation circule entre la pure opinion et le concept, ce qui est tout autre chose. La croyance ne peut pas être un concept, elle pourrait tout au plus appartenir au désir ou au conatus déterminé par le concept (Dieu). On ne peut rien faire du désir ailleurs que sur un divan de psychanalyse, et encore !

« Naïveté du passé » : alors là tu es cohérent avec ton positivisme. Remarque que tu pourrais avoir raison si au 17ème siècle il n’y avait que Bossuet, fort heureusement il y avait aussi des Gassendi et des Pascal, le moins naïf des capitalistes catholiques et jansénistes de surcroît ! Non, tu en fais ce que tu veux, mais mon rationalisme à moi exclut toute idée de progrès spirituel ou intellectuel. Ce qui ne signifie pas progrès scientifique au sens positiviste, évidemment ! Squeezer les 2/3 de la pensée d’Aristote ! Mais on n’en a pas encore compris la moitié ! Je suis très sérieux Laurent, l’anthropologie est un peu mon dada, et à l’instar de Schelling, je suis convaincu que les hommes de la préhistoire n’ont rien à nous envier au plan de ce qu’on appelle pompeusement l’humain, c’est à dire la liberté et la recherche du sens. Voir mon essai Atopie sur mon site, si ça te chante.

Religion et rites : désolé, mais je suis très confucéen, et Confucius était parfaitement athée. Ce qui veut dire, à mon sens, que le rite n’a rien de religieux a priori, il exprime un désir plus proche de celui d’un rythme qui imite celui du cosmos que de la volonté de soumettre des fidèles à des actes cultuels prescrits dans une Révélation. Le rythme, et donc le rite, étaient des obligations esthétiques fondamentales chez les Grecs.

Intolérance à l’égard des croyants : ça me rappelle le mythe de la persécution des Chrétiens dans l’Empire romain. Un petit tour dans l’histoire de la Chute de l’Empire Romain de Gibbon pourrait faire trembler tes certitudes. Les querelles intestines entre « hérétiques » ont fait beaucoup plus de morts que le système romain. Et puis aujourd’hui, où sont passé les Romains ? Qui persécute qui ? Le temps des cardinaux Mindczenti et des pères Popiescu est révolu, et je ne connais aucun, mais alors aucun épisode de persécution de croyants en France. Même les Communards ont refusé de raser Notre-Dame. Et ne viens pas me parler de la Constitution Civile du Clergé qui n’a jamais été qu’une liquidation des abus de ce même clergé. Enfin une tentative de liquidation…

L’athéisme une croyance : je ne peux pas nier qu’il y ait en chaque opinion une croyance, c’est un fondement du scepticisme et du rationalisme. Mais l’athéisme n’a pas un objet de croyance en particulier. Il est un effort dialectique pour passer des croyances « naïves » à la conscience pure de la croyance comme possibilité de relations, c’est à dire de langage et de coexistence. De relations entre personnes dotés du libre-arbitre. Comme tu es positiviste je peux comprendre que le libre-arbitre n’est pas ta tasse de thé. Voilà ce qui nous oppose de manière assez irréductible, mais cette opposition est vieille comme le monde, alors continuons d’en parler. « Nos croyances » respectives nous le permettent, ou alors c’est le fascisme, non ?

Pour ce qui reste, les « mauvais traitements » infligés par les libres-penseurs, je pense que tu rigoles. Cent ans ou presque après la séparation des églises et de l’état, l’état impose encore une médiatisation des cultes religieux, alors que les libres-penseurs ont 20 minutes par semaine pour s’exprimer.
Bien à toi
Paul KObisch

 
Guy Dufau

20/03/2004
14:05
re : les vivants et les dieux de Michel Cazenave

Il est question d'une biographie élogieuse de Saint Dominique cet espagnol qui s'appelait Domingo de Gazman y Aza,venu en Occitanie pour sauver les âmes des Justes qu'étaient les Cathares.
Il aurait mieux fait de ne pas quitter sa Castille mais ce n'est pas l'avis de Michel Roquebert "spécialiste du Moyen-âge".Venu donc avec pour bagage son "orthodoxie pure et dure",il a préché pendant cinq ans et obtenu onze conversions,des femmes devenues dominicaines,et en fouillant les archives,peut-être, treize autres conversions.
L'idée originale de Saint Dominique était de former des "savants" pour mieux combattre l'hérésie cathare,ces savants étudiaient la théologie à Paris.Ca devait leur donner des armes au cours des contreverses établies avec les hérétiques cathares.
Sur les cinq années d'activité de ce saint,la moitié s'est déroulée en pleine guerre,une guerre terrible et sans pitié,comment la contreverse qu'il préconisait pouvait avoir un sens dans ces conditions,les sbires,les inquisiteurs de l'Eglise étant d'actifs zélateurs.
Tout au long de cette émission,il n'est question que d'hérésie,d'hérétiques d'un côté et de l'autre,par exemple d'un "Etat-major spirituel" de la croisade.

En vérité,cette croisade contre les Cathares a été le meurtre d'une civilisation.Ce Domingo de Guzman y Aza du côté des assassins.
Simone Weil,dans Ecrits historiques et politiques Gallimard a pu écrire:
"Beaucoup de crimes et d'erreurs,le crime décisif a peut-être été le meurtre de ce pays occitanien...nous savons qu'il fut à plusieurs égards le centre de la civilisation romane;Le moment où il a péri est aussi celui où la civilisation romane a pris fin...plus tard eut lieu l'autre Renaissance,la fausse"
 
Gentiane Wattier

20/03/2004
14:36
re : les vivants et les dieux de Michel Cazenave


je n'ai ni votre talent ni vos connaissances pour pouvoir
prendre part à vos discussions si interessantes
Je suis une auditrice assez fidèle de cette émission qui
intellectuellement m'apporte beaucoup
Je voudrais vous dire que j'aime aussi vos débats contradictoires certes, mais qui m'apprennent tous à ouvrir les yeux, à voir plus loin, à m'assurer dans certaines de mes convictions ou à y semer le doute donc immanquablement
à susciter une recherche complémentaire de ma part ; que vous soyez négativement ou positivement critiques, je vous remercie . Je continuerai à y être aussi attachée ; dans les prochaines semaines il sera question de J.Ruysbroek, un
religieux belge qui a déja fait il y a plusieurs année l'objet d'une émission que j'avais en son temps enrégistrée et que je réécouterai afin de profiter au maximum de cette nouvelle découverte .
Fraternellement
Gentiane
 
Guy Dufau

20/03/2004
16:28
re : les vivants et les dieux de Michel Cazenave

pour être plus clair,M.Roquebert est l'auteur de ce Saint Dominique.
 
Guillaume

20/03/2004
18:28
re : les vivants et les dieux de Michel Cazenave

J'ai trouvé pour ma part que cette émission sur saint Dominique était très réussie. On ne peut pas accuser Michel Roquebert, grand historien du catharisme, d'être trop catholique ! Il est plutôt proche des cathares, mais il sait entrer dans la biographie de ce personnage, qui a cotôyé de si près les cathares (bien sûr, pour les reconvertir ou les ramener au christianisme romain). Quoi qu'il en soit, je trouvais l'émission bien faite.
 
Guillaume

20/03/2004
19:44
re : les vivants et les dieux de Michel Cazenave

Ceci était aussi très bien, à propos d'un sujet de tradition catholique...

SAMEDI 20 MARS 2004
17:00 - 18:00 APPEL D’AIR
Par Marie-Hélène Fraissé
Réalisation : Christine Diger
Lieux d’êtres…sur les traces des personnages fabuleux de la Légende Dorée
Les vies de saints et de martyres chrétiens racontées par Jacques de Voragine il y a près de 800 ans, regroupées sous le titre de « Légende Dorée » (Legenda Aurea), furent un des best sellers de tous les temps. Cette littérature populaire, pleine de miracles et de merveilles, enchantait encore Flaubert, ainsi que Blaise Cendrars, qui s’en déclarait un lecteur assidu. Peuplée de créatures vivant dans la familiarité de Dieu, dont elles tirent une force surnaturelle, la Légende Dorée demeure le guide de voyage le plus précieux pour qui entreprend de parcourir la France, l’Europe, et même l’Orient. Car comment décrypter la plupart des tableaux anciens des musées où figurent de pieux personnages dont nous ignorons tout? Comment comprendre l’omniprésence de Saint Marc et de son lion à Venise, ou celle de Saint Denis, le décapité, qui arpente toujours le nord de Paris ?
Avec Alain Boureau, concepteur de l’édition de la Légende Dorée parue dans la collection La Pléiade (Gallimard) et Bernard C .Galey, étymologiste, auteur de Nom de lieu ! (Cherche Midi)
en direct du salon du livre

A réécouter sur le site de France Culture
http://www.radiofrance.fr/chaines/france-culture2/emissions/ appeldair/

 
Benoît

21/03/2004
11:41
Cazenave, les Cathares et saint Dominique

Bonjour,

Pour information, Michel Cazenave a déjà eu l'occasion de traiter des Cathares dans deux émissions consécutives. Il était par conséquent normal de donner aussi la "parole" à saint Dominique.

Pour rappel :

Les vivants et les dieux (samedi 15 et 22 janvier 2000).
Par Michel Cazenave. Réalisation : Isabelle Yhuel.
Avec Anne Brenon, historienne, conservateur honoraire du Patrimoine de France, ancienne Présidente du Centre d’études cathares et de la revue internationale d’hérésiologie médiévale Heresis ; Michel Roquebert, philosophe, historien du catharisme.

Bien à vous,

Benoît
 
Benoît

21/03/2004
11:45
Roquebert : La geste des Cathares

La geste des Cathares

LE MONDE DES LIVRES | 03.01.02 |

L'ÉPOPÉE CATHARE I. La Croisade albigeoise II. L'Inquisition de Michel Roquebert. Perrin/Privat, respectivement 1 600 p. et 1 184 p., 2 vol.

D'abord un problème de vocabulaire. Peut-on parler d'épopée pour évoquer la vague de fer et de feu qui s'abattit sur les principautés du sud du Massif central dans la première moitié du XIIIe siècle, "barons du Nord" et inquisiteurs fondant sur un "Languedoc" dénoncé par les représentants du pape comme un foyer d'hérésie ? Même en multipliant les guillemets pour aborder la "croisade contre les Albigeois", chaque terme recelant des pièges vénéneux, induisant des partis pris ou des œillères dont le lecteur moderne, qui n'en a plus conscience, risque de prolonger la fortune historiographique, la part d'héroïsme sublime peut-elle échapper au vainqueur et célébrer le vaincu ?Il faut pourtant se rendre à l'évidence. De vignettes léguées par l'imagerie traditionnelle (de la mort de Simon de Montfort sous les remparts de Toulouse au bûcher de Montségur) en phrases fameuses (le célèbre "Tuez-les tous, Dieu reconnaîtra les siens" prêté au légat pontifical Arnaud Amaury lors du sac de Béziers en juillet 1209, aux premières heures de la "croisade"), l'épisode appartient à la légende autant qu'à l'Histoire, et ce n'est pas la monumentale Histoire des Albigeois, de Napoléon Peyrat, même inachevée (1870-1882), qui peut, malgré la force de l'évocation passionnée des parfaits et de leurs fidèles, dissiper les interprétations chimériques, puisque ce grand œuvre, aux extrapolations aussi fulgurantes que superbes, alimenta une postérité littéraire des plus fantaisistes aussi.Depuis plus de trente ans, Michel Roquebert, lui, travaille patiemment un sujet dont il s'est imposé comme l'un des plus sûrs connaisseurs. Certes, il y avait comme une gageure à entreprendre, à la fin des années 1960, quand le modèle des Annalesrécusait l'événement, une histoire de l'épisode, même dilaté sur plus d'un siècle - de l'avènement d'Innocent III, où l'idéal de la croisade oscille entre combat pour les Lieux saints (Jérusalem est tombée en 1187) et opération militaire plus strictement partisane (Venise détournant la IVe expédition sur Constantinople en 1204), à la fin des derniers "bons hommes" (Bélibaste) quand les franciscains insurgés, tel Bernard Délicieux, finissent dans les geôles de l'Inquisition (1321).En cinq livraisons, étalées sur vingt-huit ans (quatre volumes chez Privat en 1970, 1977, 1986 et 1989, un ultime avec les deux dernières parties chez Perrin en 1998), Roquebert a toutefois mené à bien son incroyable projet. Le voici désormais intégralement repris en deux énormes volumes, réunis en coffret. A l'heure où, grâce à la réhabilitation amorcée par Le Dimanche de Bouvines de Georges Duby, l'événement n'est plus abandonné avec condescendance aux simples amateurs d'anecdotes, il est temps d'apprécier le sérieux de l'entreprise, la qualité de son écriture comme la rigueur de son information.D'autant que cette nouvelle publication bénéficie d'une mise à jour (additions, corrections, actualisation de la copieuse bibliographie) qui résume succinctement l'état des débats, dispensant l'amateur de recourir à des articles souvent diffusés de façon confidentielle. La qualité des index comme, en fin de second volume, le bref mais précieux "petit glossaire du catharisme" ajoutent encore au confort du lecteur, embarqué dans une geste toujours formidable, débarrassée de trop encombrantes scories.Rappelons la parution au printemps 2001 d'une intelligente synthèse de Michel Roquebert consacrée à La Religion cathare. Le Bien, le Mal et le Salut dans l'hérésie médiévale (Perrin, "Pour l'Histoire", 360 p.).

Ph.-J. C.


 
lionel

21/03/2004
12:24
re : les vivants et les dieux de Michel Cazenave

Et bien Benoît, toi qui est historien quel est ton opinion?

Mes souvenirs sur le catharisme sont assez flous. Il y a la destruction cruelle de la civilisation occitane par le pape et le roi de France mais je ne me souviens plus du rôle de St Dominique. Voulant convertir par la douce persuasion, que prevoyait-il en cas de refus de la conversion? Se laver les mains et confier le récalcitrant au bras séculier? Les exactions de Simon de Montfort sur les "civils" cathares furent particulièrement abominables dans cette histoire.

PS: bienvenue à Gentiane, nouvelle venue il ne faut pas hésiter à s'exprimer ici!
 
Benoît

21/03/2004
13:33
Dominique et les cathares

Bonjour,

J'ai eu l'occasion d'écrire un petit article sur :

" Le défi cathare : une hérésie dualiste en plein Moyen-Age? ", Villers, 21 (2002) 36-49.

Voici ce qui j'y écrivais à propos du rôle de Dominique et des dominicains :

__________________________________________________________

Les dominicains
***************

En 1206, un prédicateur castillan d’une trentaine d’année, Dominique de Guzmán (le futur saint Dominique) prend en quelque sorte la relève des cisterciens et essaye de convertir les hérétiques à l’aide d’un nouveau type de prédication fondé sur l’exemple d’une vie pauvre et mendiante qui contrastait avec l’éclat du clergé ordinaire et des abbés cisterciens : le prédicateur se déplace nus pieds, habillé d’une simple robe blanche, et mendie pour se nourrir. Il convient de souligner cette importance particulière accordée par Dominique à la prédication. Celle-ci tiendra une grande place dans l’ordre dominicain, appelé d’ailleurs ordre des frères prêcheurs. En effet, à la différence de l’autre grand ordre mendiant, celui des franciscains pour qui la pauvreté est première, la prédication n’étant en quelque sorte que le moyen de répandre cet idéal de pauvreté évangélique, l’ordre des frères prêcheurs accorde la primauté à la prédication, la pauvreté venant après. Cela tient au contexte dans lequel est né l’ordre dominicain, à savoir la reconquête catholique de milieux passés au catharisme. Pour être crédible en prêchant l’évangile, il faut être soi-même pauvre. Mais l’important ici, c’est la prédication devant amener au rétablissement de l’orthodoxie. Mais pas plus que les cisterciens, les futurs dominicains (qui seront reconnus par la papauté en 1215) n’obtiendront de réels succès dans leur effort de reconversion des populations hérétiques du Midi. Par contre, ils joueront un rôle déterminant et efficace dans la poursuite judiciaire des cathares, une fois que l’institution inquisitoriale leur sera confiée, après qu’elle ait été mise en place dans les années 1230.

La répression : la croisade et l’Inquisition
*********************************************

L’Église, ayant échoué dans sa lutte «pacifique» contre les hérétiques, va adopter une position plus ferme. D’autant plus qu’en 1208, le cistercien Pierre de Castelnau, légat du pape, est assassiné près d’Arles dans des circonstances troubles (par un écuyer du comte ?), à l’issue d’une entrevue infructueuse avec le comte de Toulouse Raimond VI, favorable aux cathares. Le pape Innocent III l’excommunie, délie ses vassaux de leurs serments de fidélité, prêche la croisade et offre les domaines du comte à qui voudrait y participer. Dans le même temps, il canonise Pierre de Castelnau.

Cette croisade, connue dans l’historiographie comme la «Croisade contre les albigeois», connaîtra deux périodes : une première, féodale (1209-1224), une seconde, royale (1224-1229). Son importance, au plan de l’histoire générale, tient à deux éléments : premièrement, dans le domaine de l’idéologie religieuse, elle marque l’extension de la croisade en pays chrétien, croisade qui devient ainsi une lutte armée contre des hérétiques à l’intérieur de la chrétienté ; deuxièmement, dans le domaine de l’histoire nationale française, elle provoque le rattachement effectif de la France du Midi à la France du Nord, rattachement que certains passionnés d’Occitanie considèrent encore — ou plutôt surtout — aujourd’hui comme une véritable «colonisation» et «acculturation» des pays de langue d’oc par ceux de langue d’oïl. Le débat n’est donc pas clos.

[ pour la suite, il est possible d'obtenir l'article via : http://www.villers.be ]
__________________________________________________________

Bien à vous,

Benoît
 
Henry Faÿ

17/04/2004
08:49
ras-le-bol de toutes ces histoires

encore une émission de Michel Cazenave sur sexualité et spiritualité; toutes ces histoires de lingam, de Krishna le berger divin, de tantrisme, de kabbale, tout ça mélangé, un vrai salmigondis, on a entendu ça des milliers de fois, ras-le bol!


 
paul kobisch

25/04/2004
17:08
re : les vivants et les dieux de Michel Cazenave

Ah ! Enfin une bonne raction Henry, merci !
pk
 
guydufau

24/07/2004
20:53
re : les vivants et les dieux de Michel Cazenave

Mort en 1109,Saint Anselme a la réputation d'avoir prouvé l'existence de Dieu.Kant a contesté sa démostration,mais usant d'un subterfuge,il a changé la définition du mot existence.Ce que dit Anselme : on ne peut pas penser que Dieu n'est pas,car cette pensée n'existe pas.Le noeud serait: Dieu n'est pas le plus grand,il est au delà de tous les infinis,mais y a-t-il un infini plus grand qu'un autre infini? Est-ce une théologie négative? C'est une question extrémement difficile,on a tendance à l'opposer à une théologie positive.Est-ce que l'existence est un attribut de Dieu ?

Vous n'avez pas tout saisi ? C'est comme moi!
Tout ce salmigondis, entendu ce jour,Victor Hugo l'a résumé en quelques mots : "Dieu c'est l'incompréhensible incontestable"
mais je préfère : dieu c'est l'incompréhensible incommensurable.


 
Henry Faÿ

05/08/2004
17:23
pas du direct

Mais les vivants et les dieux ce n'est pas du direct. Il n'y a que du direct sur France Culture. Je ne veux plus voir cette émission

 
Guillaume

05/08/2004
17:40
re : les vivants et les dieux de Michel Cazenave

Bon, puisque l'on ouvre à nouveau ce fil, je tiens à dire à Guy que j'ai parfaitement compris l'émission sur saint Anselme et la preuve de l'existence de Dieu. On peut ne pas être convaincu par cette preuve et même être incroyant. Par contre, il suffit d'ouvrir une histoire de la philosophie, n'importe laquelle d'ailleurs, pour se rendre compte que cet argument a joué un rôle essentiel dans la réflexion philosophique jusqu'à Descartes et Kant. Si la culture consiste à réagir et à s'interroger sur soi (à partir de rien), alors ce type d'émissions est à supprimer. Mais si la culture consiste à réactiver le patrimoine, à rappeler ce qui a été pensé et comment l'on a tâché d'apporter des réponses, dans la tradition, à de grands problèmes (dont celui de Dieu, mais aussi beaucoup d'autres : l'être, le bien, le mal, la liberté, etc... pour s'en tenir à la philosophie), alors cette émission de Michel Cazenave est tout à fait indispensable. Parfois la qualité est inégale. Mais sur le fond, c'est une émission véritablement ouverte sur les questions religieuses et spirituelles, abordées sous l'angle philosophique et historique.
 
guydufau

05/08/2004
18:24
re : les vivants et les dieux de Michel Cazenave

Mais Guillaume,je ne suis pas contre cette émission,puisque je l'écoute et m'autorise un commentaire,il y a des choses obscures -pour moi- qui ne sont pas sans quelque charme.
 
Guillaume

05/08/2004
18:48
re : les vivants et les dieux de Michel Cazenave

Bien sûr, je comprends. J'écoute avec beaucoup de plaisir les cours de Michel Onfray qui sont diffusés cet été. Il a énormément d'aisance et c'est un très bon pédagogue. Mais voilà quelque qui est vraiment de parti pris. Mais c'est très intéressant, même si je ne partage pas (en tout cas pas toujours) son point de vue.
 
guydufau

06/08/2004
06:51
re : les vivants et les dieux de Michel Cazenave

Guillaume :
Michel Onfray de "parti-pris" ? oui et non.
Oui,car de toute évidence il a de la sympathie pour l'hédonisme,non,parce que c'est un chercheur,qu'il étudie les textes et qu'il fait connaitre un concept qui a été longtemps oculté.
 
guydufau

06/08/2004
07:28
re : les vivants et les dieux de Michel Cazenave

...qui a été longtemps occulté et que Michel Onfray a très bien expliqué.
 
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